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Points de vue des citoyens ordinaires
3 février 2016

Point de vue sur la triangulation

Conversations avec un jivaro à propos des moeurs politiques françaises  et de l’adoption de la loi Macron

 

Le jivaro.- Il me semble que ton pays est étrange et je ne comprends pas ce qui s’y passe. Agissez-vous toujours contre vos sentiments et vos idées ?

Moi- Mais nous n’agissons pas comme tu le dis ! Nous nous efforçons d’être logiques et cohérents. Mon pays est d’ailleurs connu pour cela, et admiré, je dirai même envié, par l’étranger.

Le jivaro.- Pourtant, la loi Macron…

Moi.- Quoi, la loi Macron ? N’est-elle pas saluée par Bruxelles et approuvée par l’Allemagne ?

Le jivaro.- Si, bien sûr, mais la façon dont elle a été adoptée…

Moi.- Que veux-tu dire ?

Le jivaro.- Ceci. J’ai lu que la plupart des mesures prévues par la loi avaient été proposées dans un rapport remis au gouvernement précédent, aujourd’hui l’opposition.

Moi.- Le rapport Attali, c’est exact.

Le jivaro.- N’était-ce pas une tentative du gouvernement actuel de se rapprocher de l’opposition ?

Moi.- En aucune manière. Il s’agissait seulement d’adopter des mesures que le gouvernement estimait bonnes en elles-mêmes, où qu’il les ait trouvées.

Le jivaro.- Et l’opposition, les jugeait-elle bonnes ?

Moi.- Il me semble.

Le jivaro.- Alors, le gouvernement et l’opposition étaient d’accord sur ces mesures ?

Moi.- Oui, dans l’ensemble.

Le jivaro.- Et l’opposition les a votées ?

Moi.- Non.

Le jivaro.- Et pourquoi, puisqu’elle les trouvait bonnes ?

Moi.- Mais parce que c’est l’opposition, et qu’alors, elle s’oppose.

Le jivaro.- Et tu trouves logique et cohérent de voter contre des mesures sur lesquelles on est d’accord ?

Moi.- Euh… Oui, parce que, pour l’opposition, ces mesures n’allaient pas assez loin. Elle a dit que « ce projet de loi… n'est qu'une compilation de mesures hétéroclites qui ne libèrent ni le travail, ni l'investissement, ni l'activité. »

Le jivaro.- Si je comprends bien, pendant qu’elle était le gouvernement, l’opposition n’a pas mis en œuvre ces mesures qu’on lui avait cependant proposées  puisqu’on le fait seulement aujourd’hui, et maintenant, en tant qu’opposition, elle reproche au gouvernement de ne pas les mettre en œuvre plus complètement ? C’est ce que vous appelez une autocritique, non ?

Moi.- Je n'en suis pas certain; l’opposition n’estime pas avoir eu tort de n’avoir rien fait quand elle était au gouvernement, elle ne pratique pas l’autocritique, elle pense que c’est le gouvernement actuel qui a tort de faire ce qu’il fait.

Le jivaro.- D’avoir fait ce qu’elle juge bon, et qu’elle n’a pas fait elle-même ?

Moi. C’est cela. Et d’ailleurs, pour le démontrer, elle a déposé une motion de censure.

Le jivaro.- Ah, oui. Le gouvernement a mis en jeu sa responsabilité à propos du projet de loi, et l’opposition dépose une motion de censure qui n’a au fond rien à voir avec ce projet.

Moi.- Mais l’opposition s’oppose ! Elle fait son travail d’opposition ! Et d’ailleurs elle parle du texte de loi dans sa motion de censure. Elle évoque même les travaux parlementaires, dont on se plaît à dire qu’ils ont été sérieux et constructifs.

Le jivaro.- Comme toujours, non ? Et ces travaux auraient pu faire changer d’avis des députés, qui n’auraient pas été d’accord au départ et le seraient devenus, ou l’inverse ?

Moi.- Certainement pas !

Le jivaro.- C’est du soutien ou de l’opposition systématique, alors ?

Moi.- Mais non ! Les parlementaires de la majorité ne sont pas des godillots et l’opposition est capable de voter des mesures avec lesquelles elle est d’accord.

Le jivaro.- Le font-ils ?

Moi.- Rarement, presque jamais.

Le jivaro.- Les parlementaires de la majorité étaient-ils tous d’accord avec le projet de loi ? L’opposition n’’était-elle pas d’accord avec les mesures prévues?

Moi.-….

Le jivaro.- Cette motion de censure, qui l’a votée ? Ceux qui n’étaient pas d’accord avec la loi Macron, et qui pouvaient l’être avec le gouvernement, ou ceux qui étaient d’accord avec la loi, mais hostiles au gouvernement ?

Moi.- Des députés appartenant aux deux catégories.

Le jivaro.- Tu veux dire que des gens qui ne sont d’accord sur rien ont été capables de s’unir contre le gouvernement ?

Moi.- Oui. En fait, ils étaient d’accord contre le projet de loi, les uns parce qu’il allait trop loin, les autres parce qu’il n’allait pas assez loin.

Le jivaro.- Et ces gens-là, qui divergent sur à peu près tout, reprochent au gouvernement de ne plus avoir de majorité ?

Moi.- Ils lui reprochent surtout d’avoir utilisé une procédure brutale.

Le jivaro.- Est- elle contraire à la Constitution ? Est-ce la première fois ?

Moi.- Pas du tout ! Elle a été mise en place dans le but de faciliter l’existence du gouvernement. Elle est même moins exigeante que celle mise en place dans d’autres pays, où les parlementaires doivent s’entendre sur le nom d’un nouveau chef de gouvernement avant de pousser l’ancien à la démission.

Le jivaro.- Alors, où est le problème ?

Moi.- A dire vrai, je ne vois pas bien…

Le jivaro.- En somme, l’opposition est semblable à quelqu’un qui a faim mais refuse de manger, non pas parce que ce qu’on lui propose ne lui plait pas, mais parce qu’on n’a pas prévu de dessert et que le menu est rédigé sous une forme qui lui déplait.

Moi.- Oui, un peu. Mais elle savait qu’elle serait rassasiée, parce que la loi serait adoptée, la motion de censure ne pouvant recueillir une majorité de suffrages.

Le jivaro.- Veux-tu dire par là que l’opposition serait hypocrite ou machiavélique au point d’avoir présenté une motion de censure pour rien, en sachant et même  en espérant qu’elle serait rejetée ? 

Moi.- Je te laisse la responsabilité du terme « hypocrite ».

Le jivaro.- Et la partie des députés qui soutiennent le gouvernement mais qui sont hostiles à ce projet escomptait aussi le rejet de la motion de censure ? C’est un peu dire : retenez-moi ou je fais un malheur ! Et évidemment se plaindre d’avoir été retenu.

Moi.- Tu es bien sévère, je trouve.

Le jivaro.- Tout ça pour ça ! Vois-tu pourquoi je dis que vous êtes étranges, vous autres Français ? Ce que je vois, moi, c’est qu’une grosse majorité de députés était d’accord sur les mesures proposées, avec plus ou moins d’enthousiasme, mais que tout ou presque a été fait pour empêcher l’expression simple et claire de cette majorité. Il me semble que la seule question qui valait était celle-ci : les mesures prévues par la loi étaient-elles utiles ?  Le débat peut être posé en termes simples, qu’en penses-tu ?

Moi.- Vu comme ça…

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